Candidat sous l'étiquette Nouveau Centre, après avoir quitté le MoDem en novembre 2007, l'ancien présentateur de l'émission télévisée « La marche du siècle » a beau jeu de dire que celui qui a « découché » ce n'est pas lui mais François Bayrou, en « rompant l'alliance avec Nicolas Sarkozy entre les deux tours de la présidentielle de 2007 ». « Quand il nous a quittés, je l'ai plaqué », explique-t-il, en sirotant un jus d'orange, vendredi 22 mai dans un café du 16e arrondissement où il a ses habitudes.
Départ du Modem en novembre 2007, mais il est parti à cause de la rupture entre les deux tours (pourtant la campagne du premier tour n'avait pas été tendre non plus), c'est-à-dire entre fin avril et début mai. Diable, cela fait ? Voyons, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre... près de six mois entre les deux événements. « Quand il nous a quittés, je l'ai plaqué ». Jean-Marie Cavada pratique l'ellipse jusqu'au paradoxe spatio-temporel. Pourquoi avoir porté les couleurs de l'UDF-MoDem lors des législatives de juin 2007 alors, s'il n'était pas d'accord avec la ligne Bayrou ? Pourquoi s'être maintenu au deuxième tour contre un candidat de la majorité présidentielle, Henri Plagnol ?
Surtout (il est dommage que la journaliste n'ait pas relevé ce fait), pourquoi avoir organisé le forum des démocrates à Seignosse en septembre 2007 ? Il s'agissait de la grande réunion préparatoire au congrès de Villepinte. A moins de souffrir de schizophrénie, il est curieux de passer un été à organiser une réunion fondatrice pour un mouvement dont on n'apprécie pas la stratégie. Et encore, il faut attendre deux mois de plus et la préparation des municipales pour que l'euro-député affirme son sarkozysme...
Pourtant, M. Cavada l'affirme : ami de longue date du président de la République qui l'apprécie depuis « La marche du siècle » consacrée à la prise d'otages par « Human Bomb » dans une école de Neuilly-sur-Seine en 1993.
Difficile de cacher son opportunisme dans ces conditions. Jean-Marie Cavada n'a bizarrement pas rallié l'UMP (même s'il en a porté les couleurs lors des municipales parisiennes), ni le Nouveau Centre en novembre 2007. Pourtant, quand on se présente comme un centriste rallié au président Sarkozy, cela aurait du sens. Non, il a créé sa propre chapelle : Avenir Démocrate. Il a intégré l'EDLR au parlement européen, mais pas le PPE, où siègent l'UMP et le NC. Qu'à cela ne tienne, lors de ces Européennes, il est investi par le Nouveau Centre, sans y adhérer (du moins, rien n'indique le contraire). Ainsi, il pourra faire comme précédemment, si la soupe lui paraît meilleure ailleurs : quitter bruyamment un parti auquel il n'a pas adhéré. Il l'a déjà fait avec le Mouvement Démocrate. D'ailleurs, changera-t-il d'affiliation une nouvelle fois au Parlement européen après ces élections ? Après la circonscription et la liste...
Enfin, dans cet article, du haut de ses convictions si authentiques, Jean-Marie Cavada dénonce l'imposture de François Bayrou, coupable selon lui de poujadisme. Alain Minc avait déjà expliqué que le MoDem était maurrassien. On comprend donc que les sarkozystes vont faire tout l'éventail de l'extrême-droite française à travers les âges. Mais Cavada n'a pas encore adopté le style de sa nouvelle maison... Au Nouveau Centre, on accuse généralement Bayrou d'avoir basculé à gauche.
« Tout ce qui est excessif est insignifiant » et qui voudra comparer le programme démocrate pour les européennes et la définition du poujadisme se rendra compte de la véracité de l'aphorisme de Talleyrand.
A lire également le billet de générations engagées sur le même sujet.