En novembre dernier j'écrivais que le Centre en France risquait de disparaître soit par insignifiance électorale, soit par assimilation à l'un des deux pôles... Les élections régionales ont montré la validité de cette alternative. Le Centre a disparu du débat électoral. État des lieux qui s'étalera sur plusieurs billets.
Pour la quatrième fois, le parti de François Bayrou a raté une élection (et de quelle manière), ce qui est d'autant plus cruel pour le parti le plus régionaliste de France... Adieu l'implantation locale de l'UDF. Après la disparition du groupe parlementaire, après le recul des mairies centristes (en dehors de quelques alliances avec l'UMP), après la division par deux du groupe d'eurodéputés, la disparition des conseillers régionaux achève d'anéantir l'existence d'élus démocrates, puisqu'il y a fort à parier que les prochaines sénatoriales seront meurtrières pour le groupe Union Centriste. Je ne parle pas des cantonales... les résultats lors des scrutins partiels étaient tellement faibles que le MoDem a décidé de ne plus y participer depuis cet automne... Un succès pour ceux qui voulaient représenter le troisième parti de France.
À moins de considérer le MoDem comme un parti régional aquitain, cette débandade généralisée montre la faillite des options choisies rue de l'Université depuis 2007. Lors des Européennes de l'été dernier, il apparaissait clairement que François Bayrou perdait l'électorat de centre-droit sans le remplacer. Le blog Barrejadis a essayé de prouver le contraire par une méthode de calcul qui ne m'a pas convaincu. Force est de constater que le MoDem n'a quasiment plus d'électorat. Après quatre scrutins qui ont été autant d'échecs grandissants, il serait bon d'en tirer les conclusions.
Au premier rang des erreurs majeures : la réunion de Marseille, l'été dernier. Elle a coûté très cher à plus d'un titre. Les thuriféraires de la cause orange argueront du fait qu'être démocrate conduit à parler avec tout le monde... Ce serait nier les évidences. Le courant du PS qui l'organisait (l'espoir à gauche) s'était signalé par sa volonté de constituer une alliance au-delà de la gauche traditionnelle. Cette réunion a accouché d'une pseudo-organisation : le rassemblement social, écologiste et démocrate. Marielle de Sarnez, le père Joseph de Bayrou, brosse lors de cette réunion un panégyrique des valeurs qui rapprochent les Démocrates de la gauche. Lors des municipales partielles, le MoDem s'est allié à la gauche. Un vice-président et un secrétaire du Conseil national se répandent pour expliquer que le changement est en marche (comprendre une alliance gauche-MoDem). Et dans la foulée, on annonce qu'il ne peut y avoir d'alliances avec la droite sous quelque forme que ce soit. Si on essaie de faire preuve d'un tant soit peu de lucidité, on est forcé d'admettre que pour l'électeur de base, le message était clair : le MoDem marchait à gauche.
Or, la volonté initiale de Bayrou consistait à attirer les déçus de la gauche. Ici, il fallait que le MoDem s'aligne sur l'axe rose-vert. De tergiversations en atermoiements, la gauche a accusé une fin de non-recevoir aux différentes mains tendues par le MoDem... L'accepter aurait conduit à sacrifier leur « pureté » politique alors que le scrutin à deux tours leur permettrait de recueillir l'électorat « démocrate » sans avoir à offrir des places. Le piège s'étant refermé, l'image du mouvement était troublé sans avoir pu obtenir le soutien de la gauche, seule alliée déclarée fréquentable. Devant l'impasse, nouvelle acrobatie en 2010 : le MoDem sera un parti autonome aux deux tours, alors que les sondages ne lui prédisent que 5 % des suffrages. Une fois de plus, le Mouvement Démocrate censé rompre avec les impasses du centrisme incarnait avec force l'une de ses plus fréquentes tares : le syndrome de la girouette.
En accueillant des déçus de la gauche plurielle, les démocrates ont cru pouvoir incarner de centre-gauche, mais cela n'existe pas en France. La gauche française a la particularité d'être fascinée par son extrême, sa radicalité et son caractère révolutionnaire. L'alliance entre la gauche de gouvernement et des communistes (ou apparentés) est naturelle... Comment être en toute rigueur de centre-gauche dans une pareille configuration ? Comment s'afficher comme des modérés et s'allier avec des partis extrémistes ? C'est pour ces raisons que sous la Ve République, le centre en France est plutôt (mais pas exclusivement) de centre-droit. La droite de gouvernement ne s'allie pas avec l'extrême-droite, ménageant un espace cohérent pour les modérés. Il est doublement signifiant que le Parti social-démocrate, composé des socialistes ayant refusé le programme commun se soit retrouvé dans l'UDF giscardienne, que lors des régionales de 1998, ce soit les centristes de Force démocrate (nouveau nom du CDS associé au PSD) qui aient refusé les élections de présidents régionaux avec l'appui du FN.
Le MoDem a cru pouvoir incarner une position nouvelle... une nouvelle fois il n'a fait que poursuivre une chimère. Trop clivant pour les électeurs modérés, trop à gauche pour son électorat traditionnel, trop à droite (après tout Bayrou, c'est un homme de droite) pour ses hypothétiques nouveaux électeurs. Quatrième échec de rang alors que les Européennes et les Régionales représentaient les élections les plus favorables, moins de 4 % des votes exprimés, ce qui le positionne en sixième force politique du pays... que faut-il de moins pour admettre que ce positionnement est un échec complet ?
Ce premier billet est intéressant.
RépondreSupprimerIl convient de se demander si dans la mesure où une grande partie de la base électorale du MoDem de 2007 et celle d'Europe Ecologie, force donnée comme émergente, est peu ou prou la même, il n'y aurait pas eu un glissement du vote de cet électorat volatil.
La notion de base électorale du MoDem en 2007 pose question, selon moi. En dehors des présidentielles, on ne l'a jamais vue. Dès les législatives, l'UDF-Modem s'est retrouvé à l'étiage habituel (ou sensiblement équivalent) du Centre. On a d'abord cru à une conséquence des présidentielles, mais finalement, rien ne prouve que le vote Bayrou n'ait pas été strictement conjoncturel.
RépondreSupprimerCe qu'il faut (aurait fallu) surtout c'est un projet clair :
RépondreSupprimerhttp://benoitb.lesdemocrates.fr/2010/02/bayrou-lalternative-ou-le-neant/
Bonjour et bienvenue sur ce blog :
RépondreSupprimerJ'avais vu votre article, mais en bon centriste je goûte peu les alternatives binaires ;-). Sinon, je suis bien d'accord avec vous sur la nécessité d'un projet clairement tranché (http://unemargueriteenprovence.blogspot.com/2009/11/la-double-tragedie-du-centre-1.html)
@ Fulrad
RépondreSupprimerLe vote sur la personne de FB en 2007 a été très certainement conjoncturel. Mais force est d'admettre que ce résultat, pour l'heure inégalé, n'a pas été "capitalisé" par le MoDem qui n'a pas su "fidéliser" cet électorat.