samedi 27 février 2010

Le non-sens d'un « grand rassemblement écolo-démocrate » (1)

J'ai préféré scinder ce billet en deux du fait de sa longueur. L'argumentation présentée n'est pas définitive et nécessite sans doute d'autres approfondissements.


Depuis les élections européennes de juin dernier, l'écologie est à la mode. Le développement durable envahit tout. Chaque groupe politique cherche à mettre une petite touche de vert sur ses tracts. Derniers exemples en date : le Parti de Gauche, dont le logo arborait jusqu'à présent qu'un bordeaux/terracota du plus bel effet, est devenu bicolore et le MoDem a même créé ad hoc une coquille vide pour remplacer un CAP21 indocile. Ces deux faits me paraissent significatifs de l'impasse que représente les divers projets de convergence entre les écologistes et les personnes issues du Centre.

Le rassemblement écolo-démocrate ne vaut pas mieux, selon moi, que le rassemblement fourre-tout de Peillon. Il ne s'agit pas de nier l'importance de la préoccupation environnementale. Il ne s'agit pas non plus de refuser par principe toute forme de coopération avec les écologistes. Mais, affirmer que la seule troisième voie possible réside dans le rapprochement entre centristes et écologistes repose sur un présupposé flou et faux d'une compatibilité évidente.

L'affaiblissement doctrinal (pour ne pas dire idéologique) du clivage droite-gauche rend particulièrement inconfortable la position centriste. La modération qui lui était propre entre une gauche marxiste et une droite conservatrice ne peut plus suffire à déterminer un espace politique véritable : les contours des deux autres familles politiques ont considérablement évolué. L'échiquier politique français baigne dans les brumes. Le seul clivage qui fonctionne électoralement réside dans la posture politique et l'opposition entre une majorité au pouvoir et une opposition qui aspire à la remplacer. L'encéphalogramme du débat public est plat. Or, le centrisme, de ce point de vue là, constitue un positionnement faible. Il apparaît comme la famille politique qui refuse de choisir, la mollassonne, l'opportuniste prête à se vendre... liste non exhaustive.

Pourtant, l'UDF avait un fond doctrinal riche et cohérent. En 2006, Jean-Louis Bourlanges le définissait ainsi :

L'UDF occupe sur l'échiquier idéologique français une position relativement claire, définie par la conjonction de l'héritage libéral, celui de Montesquieu, Benjamin Constant ou Tocqueville, et d'une exigence de solidarité inscrite dans les traditions démocrate-chrétienne et radicale. Elle s'est donc constamment située en opposition à la culture jacobine, centralisatrice et nationaliste qui domine la gauche de la gauche et la droite autoritaire. Elle s'est toujours confrontée aux champions de la « guerre civile froide » qui n'envisagent la politique que sous l'angle de la conquête d'un appareil d'État contrôlant étroitement la société. Institutionnellement, notre famille a toujours été favorable à un rééquilibrage des pouvoirs au profit des assemblées, des collectivités territoriales et de l'Union Européenne. Économiquement, nous avons toujours combattu le dirigisme et le protectionnisme, célébré les vertus de la liberté de produire et d'échanger. Socialement, nous avons toujours été favorables à une extension du champ de la politique contractuelle et à la mise en place d'instruments de solidarité combinant la prise en charge publique des besoins sociaux avec une liberté de choix renforcée pour les bénéficiaires. [Commentaire, n°119, automne 2007, p.714]

D'une certaine manière, le programme des présidentielles de 2007, supervisé par Pierre Albertini, a incarné l'aboutissement doctrinal de la nouvelle UDF. Cependant, dès son article « du Centre au projet démocrate » [Commentaire, n°119, automne 2007, pp.721-729] François Bayrou prenait ses distances avec cet héritage pour une synthèse plus large. En fait, le Mouvement Démocrate, pas encore né, s'était mis au diapason des autres formations politiques : propositions vagues, hétéroclites, course à l'électeur le plus divers. Et ce n'est pas le congrès d'Arras qui a modifié cela. Il est bien difficile de cerner la doctrine de ce parti, de saisir la cohérence de l'architecture d'ensemble ou son originalité intrinsèque dans le fameux petit livre orange.

Dernier symptôme de cette faiblesse doctrinale, l'idée que l'avenir du mouvement ne passerait que par la convergence avec les écologistes. Mieux : l'absence de rapprochement orange-vert expliquerait les échecs électoraux précédents du parti de François Bayrou. Or, si on revient aux racines de ce qu'est le centre en France, on se rend compte qu'il y a une contradiction fondamentale. La pensée centriste n'est pas soluble dans l'écologisme à moins d'être dénaturée.

1 commentaire:

  1. Le rassemblement écolo-démocrate est loin d'être une évidence. J'élimine d'entrée les Verts avec qui aucune entente n'est possible et je souhaite bien du plaisir au PS pour négocier avec eux entre les deux tours. Reste quand même les autres qui pour beaucoup ne sont marqués ni à droite, ni à gauche, un rassemblement avec les démocrates parait possible pour ne pas dire souhaitable et j'ai milité fortement dans cette voie au moment de la constitution des listes pour les régionales. L'humanisme qui devrait être le fil directeur des démocrates, intègre une grande part d'écologie, le bien être et le développement de l'homme ne peuvent se faire qu'en parfaite harmonie avec notre planète, mais l'écologie ne peut pas non plus être le seul fil conducteur et c'est ce que voudraient les écolos pour accepter un rassemblement, c'est là que le bât blesse. L'écologie ne peut être qu'une des composantes d'une politique humaniste et démocrate, elle ne peut pas en être la priorité, le jour ou les écolos auront compris ça, il sera possible de réaliser un rassemblement solide, basé sur des convictions. Pour l'instant le rassemblement ne peut être que de circonstance, basé sur des intérêts électoraux, c'est à dire qu'il vaut mieux qu'il n'y ait pas rassemblement.

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