Hier, après plusieurs reports, des rumeurs sur des difficultés entre la tête de liste choisie par le bureau exécutif et la ligne fixée par le 133 bis rue de l'Université, Laurent Gérault, chef de file MoDem dans les Pays de la Loire, s'est retiré. François Bayrou a refusé tout rapprochement avec l'Alliance Centriste, le parti de Jean Arthuis. Anatomie d'un échec.
La raison invoquée pour ce refus a trait au second tour. Jean Arthuis aurait voulu s'allier avec l'UMP. Première manipulation dans la communication démocrate : ils brandissent leur autonomie (qui est commune au projet d'Arthuis au premier tour), la pureté de leur stratégie, tout en évitant soigneusement de préciser que c'est pour mieux s'allier au PS (vous savez l'alternance, les majorités nouvelles...). Un mot pour Jean Arthuis. Il n'a jamais fait mystère que son cœur entre le PS et l'UMP penchait plutôt pour le second, mais dans la stratégie politique clairement et officiellement publiée sur le site de l'AC, il laissait la porte ouverte à l'autonomie pour les deux tours. Cette éventualité n'a pas été du goût de tout le monde semble-t-il. Cependant, en fermant la porte à ce type d'accord, le parti de François Bayrou commet une triple erreur.
Tout d'abord, ce faisant, il nie l'existence d'un espace central dans la vie politique française. Certains expliqueront que le MoDem n'est pas centriste... qu'ils écoutent un peu mieux leur leader. François Bayrou parle encore de centre, de centriste (parfois progressiste...). Toutefois, en infléchissant sa stratégie des présidentielles (on parle avec tous ceux qui se rapprocheraient du projet humanisto-démocrate) pour ne rechercher qu'une alliance avec la gauche, il succombe aux charmes du bipolarisme. La négation absolue du centre, et pour ma part, la négation du projet bayrouïste. Vous savez ce mensonge démocratique... mais les belles déclarations n'ont pas franchi les Alpes. Ce qui est le plus dommage, c'est que le refus de toute alliance avec l'UMP devient un principe intangible. À croire qu'il n'y a pas un seul candidat UMP qui ne puisse être un bon président de région, proche des préoccupations démocrates. Vive le manichéisme.
Ceci conduit à un deuxième écueil sur lequel le MoDem vient se fracasser : le MoDem n'est plus tout à fait au centre, mais il a conservé une de ses tares, le syndrome de la girouette. Depuis 2008, l'UMP n'a pas vraiment varié. Il me semble pourtant que lors des municipales, le parti orange a fait cause commune avec des listes UMP (il est vrai, c'était avant l'hémiplégie doctrinale). On nous a expliqué alors qu'Alain Juppé ou François Goulard étaient suffisamment bien pour s'allier avec eux dès le premier tour... Encore plus fameux, alors que le MoDem a soutenu Xavier Darcos au second tour à Périgueux, on refuse par principe toute éventualité d'alliance avec lui au second tour des régionales en Aquitaine... Ils étaient pourtant officiellement investis par l'UMP (sic) en 2008. Où est la cohérence dans cette stratégie (simulacre) d'indépendance ? D'aucuns me rétorqueront que je remue le passé, deux ans, c'est une éternité...
Enfin, en s'arcboutant sur cette stratégie, le MoDem reproduit la même erreur qu'aux européennes : il nationalise un débat local. Certes, la stratégie des municipales n'a pas été un franc succès. Mais changer de manière de faire à chaque élection ne présente guère d'intérêt non plus. Cela est d'autant plus visible dans les déclarations quant aux programmes régionaux. Il s'agira de décliner le projet humaniste au niveau régional. Vu l'état de délabrement d'une bonne partie des fédérations, on peut douter de la spécificité locale des programmes proposés.
Pour la bonne bouche, un exemple local de ce que je viens d'écrire par le délégué national du MoDem, Christophe Madrolle. On appréciera un premier flou sur l'existence de conseillers régionaux démocrates en PACA... il m'avait semblé qu'ils continuaient à siéger avec le groupe verts (dans lequel ils ont été élus), mais soit. Chaud devant : « Il n'est pas imaginable que Michel Vauzelle écarte le MoDem. Ce serait une erreur historique de ne pas construire une majorité social-démocrate moderne. » Et oui, braves gens, le sens de l'histoire c'est de s'allier à gauche (et rien qu'à gauche). C'est difficile aussi de critiquer le bilan d'une majorité à laquelle on appartient... L'avenir c'est la sociale-démocratie : non pas celle qui a déjà plus d'un siècle et qui a déjà échoué un peu partout en Europe, la nouvelle est « moderne », quant à savoir ce que cela signifie... Il ne m'a pas semblé que le projet humaniste fût social-démocrate... bonjour le renouvellement de l'offre politique.
La machine à perdre est donc en marche. Pour l'instant les sondages ne décollent pas (hier Dolium était donné à 5 %). Une nouvelle fois, le MoDem ne rassemble rien, mais continue à perdre des soutiens. CAP 21 n'ira pas, selon toute vraisemblance, sur les listes du mouvement qu'il a cofondé (d'ailleurs, sa présidente n'arbore rien sur son site qui puisse la lier au parti de François Bayrou... excepté le logo ADLE, mais Cavada aussi demeurait dans ce groupe après son retrait). L'Alliance Centriste, bien que compatible en termes programmatiques, souille la pureté du projet démocrate... Enfin, certains s'affranchissent de la plus élémentaire des disciplines pour s'allier à Ségolène Royal dès le premier tour... les masques tombent, un peu comme à Vitrolles. Que le leader de Charente-Maritime ne s'affole pas, au MoDem, la vérité d'un jour n'est pas celle du lendemain.
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